Le Cinéma de Jean Giono

"Artisan d’images, comme il se définit lui-même, romancier français le plus adapté au cinéma, Jean Giono s’est naturellement dirigé vers le 7e art, mais dans un tissu de relations complexes. Jacques Mény interroge ce paradoxe à l’aide d’interviews de proches et de critiques, qu’il mêle à de nombreux extraits de films, tels Un roi sans divertissement (1963) de François Leterrier ou Les Âmes fortes (2001) de Raoul Ruiz.
Bien que l’écriture romanesque soit sa priorité, Giono se retrouve vite sollicité par Gide, Jaubert ou Pagnol. Avec ce dernier, la collaboration est à la fois fructueuse et douloureuse. Pagnol adapte Un de Baumugnes, qui devient Angèle en 1934, et soumet le roman à son propre univers. Le récit devenant drame, le mythe réalisme et Manosque Marseille, Giono s’estime trahi. Mais comme le rappelle Jean-Paul Rappeneau, interviewé sur le tournage du Hussard sur le toit (1995), "pour rester fidèle à un roman, il faut le trahir". Pensant alors qu’on n’est jamais mieux adapté que par soi-même, Giono réalise Solitude (1937), court métrage influencé par l’Avant-garde des années 1920 dont Jacques Mény reproduit au cœur d’une forêt le principe de la caméra subjective, et Crésus (1960), long métrage plus classique avec Fernandel. Mais "classique" ou "avant-gardiste", Giono apparaît toujours comme ce berger, mage et sorcier, du Signe du soleil (1932) dont Cavalcanti devait filmer les mirages."
(Teddy Lussi)