Je te le rappelle, tu t'en souviens ?

Une fin de vie. Un début de siècle. Quelques jours avant sa mort, une très vieille femme tente de se remémorer son passé.
Alzheimer lui permet d’occulter et de réinventer des pans entiers de son existence, les plus douloureux, comme 12 avortements par exemple ou la froideur d’un époux distant. C'est un genre de tamis qui lui offre la possibilité de supporter le poids de son existence.
Alors elle se souvient du fox trott et de sa judéité mais a oublié son propre nom, ou plutôt ses deux noms : Sylvia Lignon et Messaouada Haki.
Ainsi, cette enquête identitaire articule-t-elle mémoire intime et histoire collective, ou plutôt, trous de mémoire et historiographie nationale. Des oublis du personnage-témoin émerge la vérité d’un sentiment au-delà de la banalité d’anecdotes disparues, de la façade lisse des archives officielles se devine un hors-champ plus complexe que seul le temps permettra d’exhumer.
C’est un film sur un être ordinaire qui a traversé la tourmente du XXe siècle avec trois guerres comme jalons du temps : la première, la seconde et la Guerre d’Algérie.
Comme cette femme était ma grand-mère maternelle et qu’elle était très bavarde avant d’être malade, je sais ce qu'elle a oublié, ou plutôt je sais – en hors champ mais en in au son – ce qu'elle m'a raconté, que je lui restitue. Comme tous ses autres proches sont morts, ce qu'elle ne m'a pas transmis a donc définitivement été effacé.
Je te le rappelle, tu t’en souviens pour incarner avec simplicité une question universelle et intemporelle : qu’est-ce qu’une vie humaine ?