Faust

Sur la côte de l’État mexicain d’Oaxaca, les grondements des temps anciens ne sont jamais loin de la surface. Les récits de métamorphoses, de télépathie et de pactes avec le diable sont ancrés dans la colonisation et l’asservissement des Amériques. Les personnages de la légende de Faust se mêlent aux habitants, tandis que l’on continue inlassablement à tenter de coloniser et dompter la nature par une constante urbanisation. Par la littérature, les mythes et les métissages locaux, la frontière entre la réalité et la fiction, le visible et l’invisible n’a plus cours.

"Entièrement filmé en 16mm, en équipe ultra-réduite, Faust sonde les mythes et traces d’un passé, enfoui dans les recoins d’un village de la côte pacifique mexicaine. Le récit de ses habitants – ou témoins – est parfois relayé, complété ou fantasmé par une voix off loquace et envoûtante. Mais sous ce flot de paroles qui semblent tramer le film, sa pellicule, c’est bien du côté de l’image, chargée de couleurs nocturnes, d’ombres et de matières opaques, que se révèle le projet de Faust. Comme chez l’écrivain national Juan Rulfo, les personnes réelles semblent bien plus fantomatiques que les spectres dont ils font le récit. La matière documentaire se pare d’allure fantastique, voire mystique. Se forme alors de manière sensitive, par touches, une œuvre de défense de ce qu’on peut appeler l’archaïsme, le film œuvrant à la métaphore d’un peuple invisible mais non disparu, qui pour se protéger du temps colonial aurait appris des animaux nocturnes à voir dans la nuit, les préservant ainsi de l’apprivoisement, et de la mort."
(MM - Festival des 3 continents)