Née le 13 janvier 1958 en Martinique, Euzhan Palcy se passionne très tôt pour le cinéma. Elle regarde les films de Fritz Lang, d’Alfred Hitchcock, de Billy Wilder ou d’Orson Welles. La jeune fille écrit aussi de petites nouvelles et des poèmes. Sa sensibilité artistique se développe au contact de la réalité martiniquaise et de ses salles obscures. À travers les films américains, elle remarque que les comédiens noirs interprètent toujours les rôles les plus dégradants, les plus ridicules. Cette constante la choque et la révolte même.[…]

La télévision française de Martinique lui donne sa première chance à 17 ans en lui confiant la réalisation d’un téléfilm, La Messagère. En 1975, Euzhan Palcy s’envole pour Paris sur les conseils de son père qui l’encourage dans son amour du cinéma mais lui conseille aussi de s’inscrire à l’université. Et c’est à la Sorbonne qu’elle décroche une maîtrise de théâtre et de littérature, un diplôme d’art et d’archéologie puis suit des cours sur l’Opéra. Elle étudie également à l’École Louis-Lumière et se spécialise en tant que directeur de la photographie.

Désormais, la jeune femme est fin prête pour réaliser son rêve : l’adaptation de La Rue Cases-Nègres au cinéma. Aidée par le destin, Euzhan Palcy rencontre François Truffaut. Passionné par le projet de la jeune réalisatrice, le plus célèbre des cinéastes français devient son parrain dans le 7e art. Il la soutient, distille ses conseils techniques et facilite les relations de la jeune réalisatrice avec les producteurs.[…]

Cette réussite la met en confiance pour poursuivre une carrière de cinéaste si bien qu’elle envisage d’adapter une autre œuvre marquante de la littérature contemporaine : Une saison blanche et sèche, le roman de l’écrivain sud-africain André Brink raconte son pays déchiré par l’apartheid et le racisme. […]

Euzhan Palcy constate que dans la plupart des films occidentaux comme à la télévision, l’image des Noirs ne varie guère. Elle décide de rentrer en France et de se replonger dans la réalité de la vie martiniquaise. Son come back prend forme à travers la création de Simeon : "un conte fantastique et musical antillais entre la vie et la mort dans lequel le fantôme d’un musicien, poète et séducteur célèbre, est le captif d’une jeune fille dont il ne peut se délivrer qu’en accomplissant une bonne action", explique la réalisatrice. Kassav' compose la musique antillaise du film pour en faire une œuvre complète et fondamentalement antillaise. Bruno Coulais en composera la musique dramatique.

Euzhan Palcy rend aussi hommage à Aimé Césaire, celui qu’elle considère comme son parrain martiniquais. En 1994, elle passe plusieurs mois à saisir son quotidien pour une série de trois films documentaires, Aimé Césaire, une voix pour l’histoire.[...]

En 2008, elle réalise L'Ami fondamental qui met en lumière l'amitié exceptionnelle entre Léopold Sédar Senghor et Aimé Césaire. Immédiatement après le film Le Comabt de Ruby Bridges, elle travaille pendant trois ans sur ce qui aurait été le "premier dessin animé noir produit par un studio américain" et dont l’action se déroule en Afrique de l’Ouest 2000 ans avant J.-C. Mais au moment de finaliser son projet, le producteur (la Fox) perd son studio d’animation et met un terme à la réalisation en cours. Peu importe, Euzhan Palcy a des dizaines d’idées et encore plus d’envies. En 2001, elle réalise The Killing Yard, un drame inédit sur la mutinerie de la prison d’Attica, qui a eu lieu 30 ans auparavant dans l’État de New York.

Au cours de l’année 2005, grâce au documentaire Parcours de dissidents, la cinéaste répare les oublis de l’Histoire en donnant la parole aux Antillais de la Seconde Guerre mondiale qui combattirent pour la liberté aux côtés du général de Gaulle. Levant le voile sur une mémoire occultée, Euzhan Palcy réalise un film émouvant et authentique qui rappelle aux jeunes générations le sacrifice des anciens pour la liberté de tous.

(Source : Cineclub de Caen)

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