Sergueï Youtkévitch

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Sergueï Youtkevitch est né dans une famille appartenant à la bourgeoisie intellectuelle de Saint-Pétersbourg en septembre 1904. Réfugié avec ses parents en Ukraine au début de la guerre civile, il se lie à Kiev avec Grigori Kozintsev : ils peignent des décors et ouvrent leur premier théâtre. Il n’a que quatorze ans. C’est dans l’enthousiasme qui porte la jeune génération des artistes révolutionnaires qu’ils créent la FEKS (Fabrique de l'acteur excentrique). Sergueï Youtkevitch se passionne pour la création populaire, l’art du clown, la pantomime, le cirque.

Il rencontre Eisenstein au GVYRM, l’école de théâtre de Meyerhold, dont il partage la débordante activité théâtrale. Il compose avec lui pour la FEKS une pantomime, la Jarretière de Colombine (1922). En 1925-26, Youtkevitch anime un spectacle de cabaret, la Blouse bleue, un "journal vivant". En 1924, il commence une carrière de cinéma comme assistant-réalisateur, puis réalisateur improvisé, dans les studios de Mejrabpom-Rouss, à vingt-ans, pour un court-métrage À nous la radio !, commencé par un "imposteur illettré" qui s’était fait passer pour cinéaste, et qu’il fallut remplacer au pied levé pour terminer le film.

Il devient ensuite décorateur et assistant d’Abram Room "le premier maître qui l’initia effectivement à tous les mystères du métier" (Le cinéma soviétique par ceux qui l’ont fait, les Éditeurs français réunis, 1966). Il tourne avec lui le Traître (1927) et Trois dans un sous-sol (1927). Il porte au cinéma ses qualités de peintre et d’esthète, dont ses deux premiers longs métrages muets : Dentelles (1928) et la Voile noire (1929) portent la marque.

Son premier film sonore Montagnes d’or (1931) marque l’entrée de la musique sérieuse à l’écran (compositeur Dimitri Chostakovitch). Accusé de formalisme, Youtkevitch devra toujours ruser pour concilier les exigences du cinéma soviétique et l’esprit d’avant-garde qui le caractérise, le rendant proche des recherches menées en Occident, celles de Picasso par exemple, qu’il admire.

Il touche à tous les genres : cinéma poétique, réalisme socialiste dans Contre Plan (réalisé avec F. Ermler), documentaires (Trois Chants sur Lénine), transpositions théâtrales (Othello), burlesque (les Aventures du brave soldat Chveïk). Il a par ailleurs écrit de nombreux ouvrages sur le cinéma, et n’a jamais renoncé au théâtre : ainsi a-t-il mis en scène la Punaise (1953) et les Bains (1955) de Maïakovski. Docteur ès arts, il fut professeur au VGIK (Institut national de la cinématographie) et artiste du peuple de l’URSS, bien que son indépendance créatrice lui ait valu le refus de deux de ses films, Chveïk s’en va-t-en guerre et Lumière sur la Russie.

Serge Youtkevitch est décédé à Moscou, le 24 avril 1985.

(Source : Kinoglaz)