Léon-Paul Fargue (1876-1947) - Souvenirs d'un fantôme

"Léon-Paul Fargue demeurera-t-il éternellement l'irrémédiable flâneur, l'avaleur de rues, l'habitué des bistrots comme des salons, le piéton de Paris pour tout dire, cette ville dont les quartiers et les faubourgs forment chacun des pays tout entiers ? N'oublions pas que Fargue n'a pas été seulement le passager inlassable des taxis qui l'ont conduit d'une rive à l'autre de la Seine mais plus singulièrement l'un des rares passeurs d'une époque à une autre : il a abordé le XXe siècle avec les yeux du XIXe (en 1900, il fête ses 24 ans), avant d'expérimenter la fascination de la vie moderne faite de wagons-lits, d'avions, de sous-marins, de machines incroyables". (J. Prieur).
Pour dessiner le portrait de Fargue, le réalisateur fait appel tout d'abord à la voix inimitable de Colette : "Peut-être ne le reconnaîtrais-je pas, si je le rencontrais au clair du jour ? Je n'ai vu Léon-Paul Fargue que la nuit (...) Il est gai, passé une certaine heure, puisque je l'ai vu gai entre onze heures du soir et les premières clartés du matin..."
Puis, après cette évocation nocturne, dans un commentaire qu'il dit lui-même, Jérôme Prieur entreprend de nous présenter Fargue : "L'homme a sans doute eu trop de figures, trop de visages pour qu'on soit sûr de le reconnaître tout à fait... Poète déchiré malgré ses allures d'empereur romain, malgré sa légende de piéton de Paris, cette ville immense où il lui fallait descendre à la recherche de son ombre, comme un ouvrier dans sa tranchée... "
Le très grand plaisir que l'on a à voir ce portrait tient d'abord au commentaire de Jérôme Prieur, et au choix des extraits de l'œuvre de Fargue qui sont lus. Les évocations de Fargue par Serge Beucler, Pierre André-May et Gisèle Freund restituent un personnage très séduisant et des documents d'archives évoquent ce Paris du début du siècle.