Roberta Flack - Piano, voix et combats

Si elle n’a pas suscité une légende équivalente à celle de Nina Simone, Roberta Flack partage beaucoup avec son aînée de quatre ans, dont une remarquable précocité pour le piano classique. Née en 1937, elle grandit en Virginie, découvrant le jeu des touches sur les genoux de sa mère, organiste à l’église. À 12 ans, l’enfant prodige se produit déjà sur scène, virtuose poursuivant sa formation loin de sa famille, sans réel espoir de carrière solo dans une Amérique ségrégationniste. Se consacrant par défaut mais avec foi à l’enseignement, la musicienne surdouée, dont le mariage avec le contrebassiste blanc Steve Novosel suscite la désapprobation communautaire, accédera finalement à la célébrité par le groove velouté de sa voix d’or. "Hypnotisé", dira-t-il, par sa sublime interprétation de The First Time Ever I Saw Your Face, Clint Eastwood l’intègre à la bande originale de son film Un frisson dans la nuit, la propulsant subitement au sommet. Marquant dès lors des standards de sa déchirante et délicate empreinte (Killing Me Softly With His Song, Feel Like Makin’ Love…), la chanteuse, coiffure afro et paupières pailletées, enchaîne les succès – première artiste à remporter deux Grammy Awards consécutifs – en multipliant les engagements, avec le mouvement Black Power - et aujourd’hui Black Lives Matter -, mais aussi auprès des femmes et pour la cause LGBTQIA+.
"Je crois en la beauté de mes rêves et en ceux des Noirs, des gens de couleur, de tous ceux qui n'ont pas de voix, et je fais de ces rêves une réalité dans ma musique", affirme Roberta Flack. Nourri d’un accès exclusif à ses archives, d’interviews d’elle et de ceux qui l’ont côtoyée au cours de sa longue carrière, ce portrait intime laisse une large place à l’art subtil de cette reine de la soul. En prenant le temps de l’écouter, le film éclaire les multiples facettes d’une star discrète qui a eu l’audace d'oser la lenteur dans sa musique, et d’une femme libre qui a lutté contre toutes les discriminations.