Aurora's Dream

"Une sonnerie Skype retentit, une jeune femme apparaît, allongée sur son lit. "Peux-tu tourner l’écran vers le mur à ta droite ?" La jeune femme exécute les demandes exprimées hors champ par une voix dont on comprend vite que c’est celle de la réalisatrice. Ainsi Dragana Jovanovic livre-t-elle d’emblée le protocole à l’origine de son film : une mise en scène à distance, par ordinateurs interposés.
Avril 2020 : en pleine pandémie de COVID, elle invite une quarantaine de ses ami.e.s confiné.e.s à lui raconter par Skype leur dernier rêve. Détourné de son simple usage de communication, Skype devient l’outil d’une mise en scène à chaque fois singulière, conçue et réglée à deux. Aurora’s Dream ne se présente donc pas seulement comme une collection de rêves, mais aussi comme un agencement de performances qui engagent le corps autant que l’esprit. La bande d’amis devient troupe de performers, la succession des rêves et de leurs récits imagés et incarnés finit par produire le sentiment d’un inconscient collectif. Selon Jung, l’existence d’un tel inconscient témoigne de ce que "nous ne sommes pas d’aujourd’hui ni d’hier ; nous sommes d’un âge immense". C’est sans doute pour ouvrir le film à cette profondeur de temps et de vision que Dragana Jovanovic entrelace la série des rêves avec une autre collection, celle de fragments de tableaux pris dans toute l’histoire de l’art.
Débordant le contexte de sa réalisation, Aurora’s Dream devient ainsi tout autre chose qu’un film de confinement : une exploration libre et fantasque de la psyché humaine comme prodigieuse fabrique d’images et de récits."
(Cyril Neyrat - FIDMarseille)