"Poésie et politique marchent ensemble"
Mati Diop sur France Inter
La réalisatrice et productrice Mati Diop, lauréate de l'Ours d'or du meilleur film à la Berlinale en février 2024 pour son documentaire Dahomey qui vient de sortir en salle, était l'invitée de l'émission La 20e heure sur France Inter.
Eva Bester présente l'émission :
"Réalisatrice et productrice, Mati Diop a reçu en 2019 le Grand Prix au Festival de Cannes pour son premier long métrage, Atlantique, poème visuel dakarois dans la lignée de ses courts métrages Atlantiques et Mille Soleils. La cinéaste mêle les genres et flirte avec le fantastique métaphysique. Son dernier film, Dahomey, qu'elle qualifie de documentaire fantastique, a remporté l'Ours d'or à la Berlinale en février 2024, et s'intéresse à la restitution de trésors pillés en 1892 lors de l'invasion par les troupes françaises d'Abomey, siège de l'ancien royaume de Dahomey, fondé au XVIIe siècle dans le sud de l'actuel Bénin.
En 2016, le président béninois Patrice Talon demande leur rapatriement, en 2017 Emmanuel Macron y répond favorablement, et en 2021, vingt-six œuvres quittent la France pour leur terre d'origine. Vingt-six sur des milliers d'autres qui peut-être un jour, feront également leur retour au pays. La restitution du patrimoine volé est l'occasion d'échanges épatants d'intelligence de la part d'étudiants béninois qui donnent foi en l'humanité et inspirent.
Quand Mati Diop a terminé l’écriture du film Atlantique, le déclencheur du projet Dahomey fut le discours d'Emmanuel Macron à Ouagadougou le 28 novembre 2017. Ce fut un choc pour la réalisatrice dont la question de la restitution était restée un angle mort dans son imaginaire alors qu'elle apparaît dans tout son cinéma en filigrane : "J'avais peu investi cette question et j’en ai eu honte parce que ce n’est jamais facile d’accepter cette sorte d’amnésie organisée. Une méthode qui a fonctionné sur nous, franco-sénégalais et afro-descendants, et je m’en suis voulu de ne pas avoir revendiqué la question de la restitution."
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Pour Dahomey, Mati Diop a pris comme repère Les statues meurent aussi d’Alain Resnais et de Chris Marker : "Dans l'urgence de la mise en place du tournage de 2021, c'était le seul film avec lequel le mien pouvait dialoguer. Je me souviens que ce documentaire m'avait énormément impressionnée, car c’est un chef-d'œuvre plastique, il y a un parti-pris radical. Je n’ai pas voulu en faire une référence, mais un point de repère. Je me questionnais sur le défi qu'allait représenter le fait de devoir filmer ces trésors royaux dans un contexte sur lequel la cheffe opératrice et moi n'allions avoir aucune maîtrise de lumière, de temps de préparation. J'avais conscience que cette première séquence au Quai Branly, soit on la réussissait et le film était possible, soit on passait à côté.""
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