Delphine Seyrig

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Actrice, réalisatrice et militante féministe, Delphine Seyrig a laissé derrière elle l'empreinte d'une femme élégante et combative.

"Ce n'est pas une femme, c'est une apparition". C'est en ces termes qu'Antoine Doinel/Jean-Pierre Léaud parle de Fabienne Tabard/Delpine Seyrig dans Baisers volés de François Truffaut (1968). La comédienne à "la voix de violoncelle", dixit l'acteur Michael Lonsdale, trouva ses plus beaux rôles chez quelques cinéastes de la Nouvelle Vague, avant de se tourner vers le militantisme féministe, dans la vie comme au cinéma.

Née en 1932 au Liban d'un père archéologue et d'une mère navigatrice, Delphine Seyrig passe son enfance d'un pays à l'autre. En 1952, elle s'installe en France, suit des cours de théâtre et décroche son premier rôle, avant de partir aux États-Unis. À New York, elle suit les cours de Lee Strasberg et découvre la méthode de l'Actor's Studio. C'est là-bas qu'elle obtient son premier rôle au cinéma dans Pull My Daisy de Robert Frank et Alfred Leslie, un film sur la Beat Generation dans lequel on retrouve Allen Ginsberg et Jack Kerouac (qui en a écrit le scénario). Repérée au théâtre par Alain Resnais, elle tourne dans L'Année dernière à Marienbad (1961), où son interprétation empreinte d'une théâtralité énigmatique, lui vaut une reconnaissance immédiate.

Delphine Seyrig devient alors l'incarnation d'une forme de modernité du cinéma français. Resnais la dirige à nouveau dans Muriel ou le temps d'un retour, en 1963, qui lui vaut la Coupe Volpi de l'interprétation féminine à Venise. Sous les traits de Fabienne Tabard, elle est objet de désir et de fascination dans Baisers Volés de François Truffaut (1968), se transforme en fée extravagante pour Jacques Demy dans Peau d'âne (1970), se pare des habits de l'envoûtante comtesse Bathory dans Les Lèvres rouges (1971) d'Harry Kümel et se fait tour à tour prostituée et grande bourgeoise pour Luis Buñuel dans La Voie lactée (1969) et Le Charme discret de la bourgeoisie (1972). Elle tourne également pour les cinéastes William Klein (Qui êtes-vous Polly Magoo ?, 1966, Mr Freedom, 1969) et Joseph Losey (Accident, 1966, Maison de poupée, 1973).

Mais Delphine Seyrig est aussi une femme de conviction. Militante féministe engagée, elle signe, aux côtés de Catherine Deneuve, Jeanne Moreau, Romy Schneider ou Simone de Beauvoir, le Manifeste des 343 Salopes, publié en avril 1971 dans Le Nouvel Observateur, et participe quelques mois plus tard à la Marche des Femmes. Au cinéma, elle se tourne vers des réalisatrices dont elle apprécie la vision nouvelle. Elle collabore notamment avec Marguerite Duras sur quatre films (La Musica, 1967, India Song, 1975, Son nom de Venise dans Calcutta désert, 1976, et Baxter, Vera Baxter, 1977), avec Chantal Akerman sur Jeanne Dielman, 23, quai du commerce, 1080 Bruxelles (1975), mais aussi avec Liliane de Kermadec, Patricia Moraz, Pomme Meffre ou l'artiste expérimentale et anticonformiste allemande Ulrike Ottinger.

C'est tout naturellement que Delphine Seyrig passe de l'autre côté de la caméra. Avec Carole Roussopoulos, pionnière de la vidéo et activiste féministe, elle réalise deux films militants et impertinents : Maso et Miso vont en bateau en 1975, et SCUM Manifesto l'année suivante. De 1976 à 1981, l'actrice s'attèle à la réalisation d'un documentaire, Sois belle et tais-toi, compilation d'une vingtaine d'entretiens qu'elle a menés avec des actrices françaises, anglaises et américaines (parmi lesquelles Shirley McLaine, Jane Fonda, Maria Schneider, Marie Dubois ou Ellen Burstyn), qui s'expriment sur leur expérience professionnelle, la place et les rôles que le cinéma veut bien leur donner. Avec ses camarades féministes, elle fonde en 1982 le Centre audiovisuel Simone de Beauvoir, consacré à la mémoire des luttes des femmes.

(Source : L'Express)


+ Consulter l'ouvrage Delphine Seyrig - En constructions

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